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ArcelorMittal à Fos se projette sur les aciers verts


Rédigé le Mercredi 4 Novembre 2020 par Jean-Christophe Barla


Le sidérurgiste veut atteindre la neutralité carbone en 2050. Fos-sur-Mer devrait bénéficier de cette stratégie avec le projet CarbHFlex pour 2026 et un recyclage accru de l’acier.


A l’avenir, ces bobines d’acier d’ArcelorMittal à Fos seront progressivement fabriquées en émettant de moins en moins de carbone. (Photo JC Barla)
A l’avenir, ces bobines d’acier d’ArcelorMittal à Fos seront progressivement fabriquées en émettant de moins en moins de carbone. (Photo JC Barla)
Avec 1,3 milliard d’euros investis en 20 ans pour moderniser le site de Fos-sur-Mer et réduire son empreinte environnementale, ArcelorMittal a fait le choix de la pérennité en Provence. Son ambition de réduire de 30% à l’horizon 2030 ses émissions de carbone en Europe et d’atteindre la neutralité carbone en 2050 sur la fabrication de ses aciers se déclinera sur Fos ainsi qu’à Gand en Belgique, Brême et Hambourg en Allemagne, Dunkerque en France. Les options feront l’objet d’arbitrages d’ici à fin 2022. « Le mix de solutions pourra varier selon le contexte local » admet le directeur d’ArcelorMittal Méditerranée, Bruno Ribo, qui les présentait, le 3 novembre, avec son responsable « projets décarbonation », Damien Chambolle. La conversion des installations à la production d’aciers verts devrait prendre plusieurs formes à Fos-sur-Mer.

Nouvelles méthodes en vue

Outre l’amélioration de l’efficacité énergétique, à l’œuvre depuis quelques années, l’augmentation du recyclage de l’acier est la première « méthode traditionnelle » de décarbonation envisagée pour réduire de 20% en 2030 les émissions de CO2. Elle vise à multiplier par six d’ici à 2024 et par dix à 2030 la quantité d’acier recyclé utilisée dans le process. L’objectif nécessitera une refonte de l’approvisionnement en ferrailles extérieures à l’usine, de l’ordre de 90 000 tonnes actuellement. « Nous voulons le monter à 500 000 tonnes » indique Bruno Ribo, en précisant que l’usine recycle déjà 400 000 tonnes par an de ses propres déchets de ferrailles. L’implantation d’un nouveau four de réchauffage de l’acier liquide (four poche) sera nécessaire dans un premier temps (2021-2024), et d’un four de préfusion dans un second temps (2030). Deux autres méthodes plus novatrices de décarbonation sont explorées par le groupe sidérurgique, le « Smart Carbon » et le DRI (Direct Reduced Iron) / Hydrogène. La première consiste à capter et réutiliser le CO2 émis par les hauts-fourneaux dans leur propre fonctionnement, la seconde à remplacer à terme le charbon par l’hydrogène afin de réduire le minerai de fer sans émettre de CO2. C’est une approche « Smart Carbon » qui est projetée pour Fos afin de diminuer, à hauteur de 14% supplémentaires, les émissions de CO2. Elle combinera l’adaptation du projet-pilote « Carbalyst » mené à Gand, sur un nouvel outil baptisé « CarbHFlex » et de « haut-fourneau vert » conduite à Dunkerque. L’idée consiste à capturer le carbone dans les gaz résiduels des hauts-fourneaux et de l’aciérie et de les transformer, par l’intermédiaire de bioréacteurs et de bactéries, en différents produits (éthanol, alcool isopropylique, acétone) utilisables en chimie, en plasturgie ou en biocarburant. Le dossier CarbHFlex vient d’être déposé au niveau européen.

Contreparties indispensables

A l’avenir, de l’hydrogène vert produit par électrolyse à partir d’énergies renouvelables pourra être injecté lors du procédé, puis remplacer du charbon utilisé dans le haut-fourneau. « Nous aurons besoin de volumes énormes d’hydrogène » glisse Damien Chambolle, convaincu que la perspective peut attirer des investisseurs spécialisés sur la zone industrialo-portuaire, même si l’industriel discute déjà avec KemOne. « Ces projets représentent plusieurs centaines de millions d’euros, nous ne pouvons pas les faire seuls » confie Bruno Ribo qui réclame en contrepartie aux autorités françaises et européennes « des mécanismes de réduction des distorsions de concurrence » par rapport à des aciers non-européens affranchis de telles obligations environnementales. Les surcoûts de production sont estimés entre 30 et 80% selon les techniques. « Nous espérons une prise de conscience pour aider une filière solide et performante comme la sidérurgie sur sa décarbonation. L’enjeu, c’est ici et maintenant. Sinon, elle ne pourra plus produire d’acier à coût compétitif ». ArcelorMittal Méditerranée a fabriqué à Fos 3,66 millions de tonnes d’acier en 2019 avec 2 500 salariés et 1 500 sous-traitants.




Jean-Christophe Barla




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