Roxane Randazzo (Airbus Helicopters), Jean-Michel Diaz (GMIF), Etienne Roche (Carbon) et Philippe Dumont (ADF) ont exposé l’intérêt de bien suivre les projets industriels du territoire pour espérer en profiter. (Photo JC Barla)
Avec 11 milliards d’euros d’investissements industriels à l’étude sur le pourtour de l’étang de Berre, une cascade de défis se présente à la Métropole Aix-Marseille-Provence et à tout le tissu entrepreneurial régional. « Entre 10 000 et 16 000 emplois pourraient en découler, confie Jean-Michel Diaz, le président du GMIF. Si on n’en faisait que 30 %, ce serait déjà très bien, aucune grande unité industrielle ne s’étant implantée sur le territoire depuis quarante ans. Mais il faut mettre en œuvre les moyens d’accueillir les entreprises, en termes de foncier et d’instruction des dossiers, de produire les 5 GW d’énergie dont ces projets auront besoin, de former des jeunes pour accéder à ces emplois, de mieux connecter le port à son hinterland, de renforcer les infrastructures routières et le logement pour les salariés… Il y aurait besoin d’une mission d’Etat « Une industrie en grand », pour tout coordonner ». Soucieux d’anticiper la perspective à son échelle, le GMIF a relancé le 21 septembre à la villa Khariessa à Martigues ses rencontres « B to B » entre grands donneurs d’ordres, sous-traitants et prestataires potentiels afin qu’ils appréhendent leurs besoins et savoir-faire respectifs et collaborent peut-être demain… Une table ronde concluait la matinée pour marteler le message, d’autant plus que la transformation des industriels existants ouvre aussi des marchés à capter.
Un enjeu de transformation inimaginable hier
Airbus Helicopters s’est ainsi engagé dans la décarbonation de ses activités à Marignane où il accueille chaque jour 12 000 personnes. « Nous voulons être un pionnier de l’industrie aéronautique durable, grâce à des technologies innovantes sur les appareils et notre outil industriel et à l’intégration de nouvelles sources énergétiques afin de faire voler en 2030 nos hélicoptères avec 100 % de carburants décarbonés » explique Roxane Randazzo, responsable du plan de développement du site de Marignane. Et elle est très claire sur la manière d’atteindre l’objectif : « Nous ne pourrons pas tout faire tout seul. Nous faisons bouger les lignes avec nos entreprises sous-traitantes. Nous avons commencé une démarche d’écologie industrielle et territoriale (EIT) qui nous a amené à auditer 28 sociétés. Cinq se sont déclarées volontaires pour réduire leur impact environnemental en trois ans, avec l’appui d’Airbus Helicopters, du pôle Safe, de la Région et de l’Ademe. En un an, les émissions de CO2 ont déjà diminué de 10 % grâce à des économies d’énergie et des innovations de procédés ». L’objectif est d’atteindre 20 % à la fin des trois ans. Pour Philippe Dumond, directeur Grands comptes d’ADF, à Vitrolles, « l’industrie vit une mutation qu’on n’aurait jamais pu imaginer voici quelques années… On travaille à l’optimisation des émissions, à la préservation des ressources en eau, on entend parler aujourd’hui de stations de désalinisation… Pour faire évoluer nos compétences, nous nous tournons vers l’écosystème, vers des start-ups aussi pour qu’elles réussissent la phase d’industrialisation de leurs solutions… Ce sont des challenges à réussir ensemble ». Ils sont chacun porteur d’expansion : ADF a agrandi ses installations à Fos, il automatise des process, œuvre sur toute sa chaîne, de l’ingénierie à la maintenance, pour améliorer ses pratiques et en faire bénéficier ses clients de l’énergie, des matériaux, de la mobilité, de la santé/bien-être ou des technologies du spatial-défense. « L’humain reste essentiel » insiste-t-il, convaincu que la jeunesse doit apporter sa part à cette émergence d’un futur plus sain.
Un modèle porteur d’espérance
Le GMIF planche sur la constitution d’une « task force » de « Cadets de l’industrie », jeunes prêts à « tourner leur regard vers des métiers industriels », selon Jean-Michel Diaz… Pour Etienne Roche, directeur de cabinet du président de Carbon, Pierre-Emmanuel Martin, dont le projet de giga-usine de cellules et panneaux photovoltaïques, prévu à Fos, est en concertation publique (1,5 milliard d’euros d’investissement), le seul chantier de construction devrait générer un millier d’emplois en sous-traitance, services, transport, logistique… L’unité, elle, ambitionne d’embaucher 3 000 personnes dont 2 000 opérateurs. « La zone industrialo-portuaire n’est pas un de ces sites clés en mains pour l’implantation d’industries comme on en voit ailleurs en Europe, dit-il. Mais grâce à un modèle coopératif et collectif tels que PIICTO ou le Laboratoire Territorial Industrie Fos-Berre le portent, Fos peut être un épicentre de la réindustrialisation verte de la France et de l’Europe ». Pour Jean-Michel Diaz, ces rendez-vous « B to B » seront donc peut-être accrus en fréquence. « Il importe de se voir souvent pour que notre économie se développe, que les entreprises recrutent localement et qu’on vous donne notre vision pour vous accompagner au mieux » dit-il en conclusion des échanges.
Lors du BtoB Industrie, les cinq principaux partenaires ont rappelé l'importance de nouer des alliances avec les acteurs locaux
Images et montage : Elodie Trujillo