STMicroelectronics à Rousset se dit prêt à développer ses coopérations avec d’autres entreprises régionales pour restaurer une souveraineté française (Photo JC Barla).
Beaucoup de projets d’investissements industriels de start-ups et PME électroniques régionales bénéficient d’un appui du plan France Relance (1). En quoi ces dispositifs contribuent-ils à conforter la filière ?
Avec le plan France Relance, l’Etat affiche sa volonté d’aider à la résilience et à la souveraineté de l’industrie française par la création, la relocalisation ou l’extension d’activités. La microélectronique fait partie des filières qu’il considère stratégiques. Dès les premières annonces gouvernementales, nous avons expliqué aux entreprises du secteur qu’il y avait une opportunité d’accéder à des financements pour se développer, nous les avons incitées à candidater et certaines s’en sont saisies pour accélérer une extension, arrêter de produire à l’étranger ou lancer une nouvelle activité. Les dispositifs, dérogatoires aux règles européennes habituelles, étaient intelligents et généreux, il fallait réagir d’autant plus vite qu’ils engendrent une concurrence entre les territoires. Le pôle a accompagné les TPE/PME qui n’étaient pas habituées à remplir ces dossiers, nous avons répondu à des questions techniques des financeurs, étant sur le comité de pilotage avec la Préfecture et la Région… Dès septembre 2021, Provence-Alpes-Côte d’Azur était l’une des premières régions à bénéficier de ces financements fléchés, nationaux ou territoriaux, avec 21 dossiers retenus dans les appels à projets.
L’industrie française souffre de sa dépendance à l’étranger dans ses approvisionnements de composants. La relocalisation d’activités est-elle inimaginable ou possible ?
Cette crise sanitaire a permis de progresser dans l’état d’esprit et la volonté mais le chemin sera de longue haleine. Des freins persistent. D’abord, le foncier, tout le monde n’a pas la place pour y repositionner ses activités. Quand il y en a, il est cher, quand il est plus accessible, il est loin des métropoles. Il y aurait intérêt à construire une « task force » dédiée à l’attractivité de ces projets de relocalisation. Ensuite, le problème de compétences perdure. Les entreprises peinent à les trouver. En production, le mal est profond car, depuis des années, la société a laissé entendre que travailler dans l’industrie n’était pas valorisant. Heureusement, l’Etat, les Régions, les organisations professionnelles s’emploient à démontrer que ce n’est pas le cas, que le secteur offre des perspectives d’insertion et d’épanouissement, plutôt bien rémunérées. Les efforts en faveur de l’apprentissage devraient aussi payer. Nous pouvons espérer que le mouvement s’inverse. Sur les métiers de la R&D, de l’intelligence artificielle, notre pays souffre de ne pas sortir assez d’ingénieurs. Le projet I-NovMicro, déployé dans la région par un consortium d’acteurs industriels et académiques, va dans le bon sens. Nous allons demander aux TPE/PME de nous exposer les besoins qu’elles pourraient avoir à l’horizon de trois ou quatre ans. Dans la formation, il faut anticiper sur du moyen-long terme. Nous aiderons parallèlement à l’adaptation des programmes pour que les cursus collent aux emplois futurs des entreprises.
Avec le plan France Relance, l’Etat affiche sa volonté d’aider à la résilience et à la souveraineté de l’industrie française par la création, la relocalisation ou l’extension d’activités. La microélectronique fait partie des filières qu’il considère stratégiques. Dès les premières annonces gouvernementales, nous avons expliqué aux entreprises du secteur qu’il y avait une opportunité d’accéder à des financements pour se développer, nous les avons incitées à candidater et certaines s’en sont saisies pour accélérer une extension, arrêter de produire à l’étranger ou lancer une nouvelle activité. Les dispositifs, dérogatoires aux règles européennes habituelles, étaient intelligents et généreux, il fallait réagir d’autant plus vite qu’ils engendrent une concurrence entre les territoires. Le pôle a accompagné les TPE/PME qui n’étaient pas habituées à remplir ces dossiers, nous avons répondu à des questions techniques des financeurs, étant sur le comité de pilotage avec la Préfecture et la Région… Dès septembre 2021, Provence-Alpes-Côte d’Azur était l’une des premières régions à bénéficier de ces financements fléchés, nationaux ou territoriaux, avec 21 dossiers retenus dans les appels à projets.
L’industrie française souffre de sa dépendance à l’étranger dans ses approvisionnements de composants. La relocalisation d’activités est-elle inimaginable ou possible ?
Cette crise sanitaire a permis de progresser dans l’état d’esprit et la volonté mais le chemin sera de longue haleine. Des freins persistent. D’abord, le foncier, tout le monde n’a pas la place pour y repositionner ses activités. Quand il y en a, il est cher, quand il est plus accessible, il est loin des métropoles. Il y aurait intérêt à construire une « task force » dédiée à l’attractivité de ces projets de relocalisation. Ensuite, le problème de compétences perdure. Les entreprises peinent à les trouver. En production, le mal est profond car, depuis des années, la société a laissé entendre que travailler dans l’industrie n’était pas valorisant. Heureusement, l’Etat, les Régions, les organisations professionnelles s’emploient à démontrer que ce n’est pas le cas, que le secteur offre des perspectives d’insertion et d’épanouissement, plutôt bien rémunérées. Les efforts en faveur de l’apprentissage devraient aussi payer. Nous pouvons espérer que le mouvement s’inverse. Sur les métiers de la R&D, de l’intelligence artificielle, notre pays souffre de ne pas sortir assez d’ingénieurs. Le projet I-NovMicro, déployé dans la région par un consortium d’acteurs industriels et académiques, va dans le bon sens. Nous allons demander aux TPE/PME de nous exposer les besoins qu’elles pourraient avoir à l’horizon de trois ou quatre ans. Dans la formation, il faut anticiper sur du moyen-long terme. Nous aiderons parallèlement à l’adaptation des programmes pour que les cursus collent aux emplois futurs des entreprises.
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De grands donneurs d’ordres se disent prêts à mieux travailler avec des fournisseurs et sous-traitants régionaux. STMicroelectronics, par exemple, l’a assuré lors du Forum de l’Industrie de demain. Comment le pôle peut-il renforcer la mise en relation ?
Nous percevons ce vœu des grands industriels de s’ouvrir à des compétences extérieures, de ne plus tout faire eux-mêmes, d’agir en partenariat plutôt que dans un rapport donneur d’ordres / fournisseur ou sous-traitant. L’approche « Innovation ouverte » semble prendre forme. ST en atteste. Les start-ups sont demandeuses, même si la peur persiste d’être pillée ou copiée. Nous ne pouvons qu’encourager de telles démarches, nous l’avons toujours fait…
Peut-on envisager que les composants que les industriels vont chercher en Asie aujourd’hui puissent un jour être accessibles en France grâce à ces collaborations ?
Soyons réalistes, nous ne parviendrons jamais à 100% d’autonomie. Mais il y a une volonté réelle au plus haut niveau d’accroître la production de semi-conducteurs en Europe, le COVID ayant permis de prendre conscience à quel point la désindustrialisation de notre pays l’avait rendu dépendant des fournisseurs asiatiques, même si ça fait 20 ans qu’on avait détecté le risque... Actuellement, l’industrie du continent ne pourvoit qu’à 10% de ses besoins. Donc, 90% sont achetés à l’extérieur. Je pense donc qu’on verra de plus en plus de capacités de production en Europe dédiées à des acteurs européens. Attention, néanmoins, à ne pas se tromper de combat. Certains veulent se positionner sur des technologies très avancées qui peuvent répondre aux marchés de grande consommation tels la téléphonie mobile ou les consoles de jeux, mais le gros de la demande de l’industrie ne porte pas sur des solutions aussi poussées. Il s’agira de bien arbitrer pour que les capacités mises en œuvre satisfassent les clients européens un peu plus qu’aujourd’hui. Nous sommes sur la bonne voie, le plan « France 2030 » en témoigne. J’espère que nous entrons dans une nouvelle dynamique de long terme et pas seulement conjoncturelle.
Nous percevons ce vœu des grands industriels de s’ouvrir à des compétences extérieures, de ne plus tout faire eux-mêmes, d’agir en partenariat plutôt que dans un rapport donneur d’ordres / fournisseur ou sous-traitant. L’approche « Innovation ouverte » semble prendre forme. ST en atteste. Les start-ups sont demandeuses, même si la peur persiste d’être pillée ou copiée. Nous ne pouvons qu’encourager de telles démarches, nous l’avons toujours fait…
Peut-on envisager que les composants que les industriels vont chercher en Asie aujourd’hui puissent un jour être accessibles en France grâce à ces collaborations ?
Soyons réalistes, nous ne parviendrons jamais à 100% d’autonomie. Mais il y a une volonté réelle au plus haut niveau d’accroître la production de semi-conducteurs en Europe, le COVID ayant permis de prendre conscience à quel point la désindustrialisation de notre pays l’avait rendu dépendant des fournisseurs asiatiques, même si ça fait 20 ans qu’on avait détecté le risque... Actuellement, l’industrie du continent ne pourvoit qu’à 10% de ses besoins. Donc, 90% sont achetés à l’extérieur. Je pense donc qu’on verra de plus en plus de capacités de production en Europe dédiées à des acteurs européens. Attention, néanmoins, à ne pas se tromper de combat. Certains veulent se positionner sur des technologies très avancées qui peuvent répondre aux marchés de grande consommation tels la téléphonie mobile ou les consoles de jeux, mais le gros de la demande de l’industrie ne porte pas sur des solutions aussi poussées. Il s’agira de bien arbitrer pour que les capacités mises en œuvre satisfassent les clients européens un peu plus qu’aujourd’hui. Nous sommes sur la bonne voie, le plan « France 2030 » en témoigne. J’espère que nous entrons dans une nouvelle dynamique de long terme et pas seulement conjoncturelle.
En quoi ces évolutions peuvent-elles impacter les missions du pôle SCS ?
Nous avons réussi à bâtir et structurer un écosystème électronique qui réunit des acteurs dans l’immatériel, la cybersécurité, l’intelligence artificielle, les logiciels, et d’autres qui font du hardware… Que la production redevienne la préoccupation primordiale des décideurs ouvre des opportunités pour capturer des investissements sur la région, affirmer l’existence de notre filière, jouer notre rôle d’accompagnement des projets… C’est un atout supplémentaire pour le pôle, les acteurs, le territoire. La phase 4 du pôle, sur quatre ans (2019-2022), s’achèvera fin 2022. Nous espérons que la phase 5, à partir de 2023, s’appuiera encore plus sur la relocalisation et la réindustrialisation et les stratégies développées par le pôle de compétitivité.
Nous avons réussi à bâtir et structurer un écosystème électronique qui réunit des acteurs dans l’immatériel, la cybersécurité, l’intelligence artificielle, les logiciels, et d’autres qui font du hardware… Que la production redevienne la préoccupation primordiale des décideurs ouvre des opportunités pour capturer des investissements sur la région, affirmer l’existence de notre filière, jouer notre rôle d’accompagnement des projets… C’est un atout supplémentaire pour le pôle, les acteurs, le territoire. La phase 4 du pôle, sur quatre ans (2019-2022), s’achèvera fin 2022. Nous espérons que la phase 5, à partir de 2023, s’appuiera encore plus sur la relocalisation et la réindustrialisation et les stratégies développées par le pôle de compétitivité.
- StId, Smart Packaging Solutions, Eyco, Fenotag, Optim Wafer Services, Centiloc, Ion Beam Services, Nawa Technologies…