Pour Ben Sarfati et Selim Kebaier (Deep Scouting), Jean-Philippe Desbiolles (IBM) et Stéphane Bergamini (SATT Sud-Est), l’IA n’est plus une option pour les entreprises mais une obligation. (Photo JC Barla)
« Dans l’intelligence artificielle, les systèmes apprendront toute leur vie. Nous sommes mortels, pas eux ! Il est donc indispensable de mettre en place les meilleurs outils pédagogiques et de veiller à la nécessité de l’inclusion, de refléter toute la diversité de la société, de mettre de l’éthique, de la confiance, de la transparence et de l’intégrité, avec des valeurs objectivées et pragmatiques… L’IA doit devenir notre propre miroir » soutient Jean-Philippe Desbiolles. Le vice-président et « Managing Director Financial Services » d’IBM France a tenté d’éveiller les esprits de plusieurs entrepreneurs lors d’une conférence tenue le 24 octobre au sein du « riality Lab » de Marseille. Fondé par la CCI Aix-Marseille-Provence et situé sur 250 m2 au rez-de-chaussée du Palais de la Bourse, le lieu de sensibilisation et d’acculturation aux technologies d’intelligence artificielle a conclu un partenariat avec le groupe pour approfondir l’expertise interne et éclairer, sur le plan pratique (cas d’usages, retours d’expériences…) et par la réflexion (webinaires, séminaires…), les entreprises provençales sur des solutions aptes à bouleverser leurs modes de fonctionnement. Jean-Philippe Desbiolles s’est évertué à ébranler les réticences : à ses yeux, « il n’y a pas à se demander si c’est bien ou pas, il faut y aller pour ne pas se fragiliser ». Présidente du « riality Lab », Valérie Segrétain a insisté pour sa part sur sa volonté d’apporter du sens dans ce partenariat.
Objectiver des données
Convié à la table ronde au titre de ses responsabilités à la SATT Sud-Est, Stéphane Bergamini qui s’emploie à favoriser les transferts de technologies entre les laboratoires universitaires (Aix-Marseille Université, CNRS, Inserm…) et l’industrie, a regretté que si les recherches et les innovations sur l’IA « explosent » au sein de ces laboratoires, « les entreprises ne perçoivent pas l’avantage concurrentiel qu’elles peuvent en tirer dans leurs domaines d’activité ». Leurs potentialités commencent à émerger dans le médical, la mobilité, le BTP, l’exploration sous-marine… Mais pour lui, la crainte d’un risque d’asservissement aux capacités exponentielles d’une machine reste un frein persistant alors que ces solutions d’IA peuvent accélérer des performances, des prises de marché… Il admet néanmoins que « si les chercheurs ont des quantités astronomiques de technologies fondées sur l’IA, toutes ne sont pas encore forcément matures pour être exploitables dans des sociétés ». Cofondateur avec Morgan Godard de Deep Scouting à Marseille, Selim Kebaier n’a pas tardé, lui, à faire de l’utilisation de données passées au crible d’algorithmes d’intelligence artificielle, un socle pour se distinguer. La start-up a décidé d’aider les clubs de foot professionnels « à recruter plus intelligemment », en s’appuyant sur une base de données de plus d’un million de joueurs à travers le monde, dès lors qu’ils ont plus de 18 ans. « Nous sommes dans la science de la donnée appliquée au sport » explique-t-il, les données extraites pour cibler les qualités d’un footballeur apte à remplacer efficacement un joueur transféré, étant complétées par des vidéos, des observations et supervisions en matches avant la prise de décision finale… Ses solutions peuvent aller jusqu’à établir une valeur marchande du profil concerné. « Avec l’extraction de données, nous pouvons fournir au club une liste de cinq joueurs possédant les caractéristiques les plus proches du profil recherché. Dans chaque recrutement, il peut y avoir une notion de pari. L’IA permet de le rationaliser avec des données objectives » poursuit-il. La société vient de recruter elle-même un jeune « data scientist », Ben Sarfati, pour s’étoffer, et espère prochainement séduire l’Olympique de Marseille...