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Le Club immobilier Marseille-Provence en itinéraire découverte à Fos-sur-Mer


Rédigé le Mercredi 2 Octobre 2024 par Jean-Christophe Barla


La 17ème Journée de l’Immobilier du Club Immobilier Marseille-Provence s’est déroulée sur la zone industrialo-portuaire. Une occasion de démontrer combien ce territoire est stratégique pour le devenir de l’économie et de l’aménagement de la Métropole.


©Thierry Vaudé
©Thierry Vaudé
« Ce territoire est un moteur pour l’ensemble de la Métropole Aix-Marseille-Provence. Il y a ici de quoi bâtir un Sophia-Antipolis de l’industrie. Si tous les projets industriels prévus à l’ouest voient le jour, il y aura beaucoup plus de demandes en immobilier tertiaire à Marseille et Aix-en-Provence ». Philippe Stéfanini, directeur de l’agence économique Provence-Promotion, a résumé l’enjeu à la centaine de professionnels venus jusqu’à Port-Saint-Louis-du-Rhône assister à la Journée de l’Immobilier du 12 septembre.

A l’initiative de Jérôme Dentz, président du Club Immobilier Marseille-Provence (CIMP) et d’Emmanuel Dujardin, en charge de l’organisation de cette rencontre, le déplacement visait à inciter les participants à « regarder et revenir au-delà du col du Rove pour voir ce qui s’y passe », comme l’a indiqué, le directeur délégué du groupe Snef, William Joly, en semblant regretter la méconnaissance générale des problématiques qui concernent les villes et zones économiques du pourtour de l’étang de Berre et du golfe de Fos.
« Les défis de demain se passent à l’ouest. Il faut y préparer les populations » clame le maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône, Martial Alvarez. Il y a certes l’équilibre à restaurer entre développement industriel, environnement et santé des habitants, historiquement délaissé ou ignoré, mais aussi des besoins en logements, en infrastructures routières (souvent promises, toujours pas concrétisées) et ferroviaires, en compétences, en foncier économique.

Qui plus est si les « giga-usines » qui voient la zone industrialo-portuaire (ZIP) comme un Eldorado réussissent à y ouvrir leurs portes (Carbon, GravitHy, H2V, Elyse Neocarb…) et celles qui existent font aboutir leur transformation (ArcelorMittal, Marcegaglia, dans la sidérurgie, KemOne, LyondellBasell dans la pétrochimie, Elengy avec MedHyterra dans l’énergie). Soit 12 à 15 milliards d’euros d’investissements envisagés et 10 000 emplois d’ici à 2030 au bas mot. « Les répercussions concerneront toute la métropole » assure Emmanuel Dujardin.

Rémi Costantino (GPMM) assure que le Port peut devenir un "hub de décarbonation" (Photo JC Barla)
Rémi Costantino (GPMM) assure que le Port peut devenir un "hub de décarbonation" (Photo JC Barla)

Un collectif à mieux coordonner et piloter

Comment procéder pour relever ces défis simultanés dans un temps limité et dans un pays où les procédures laissent toujours planer le risque de l’incertitude, voire du renoncement ? Régis Passerieux, sous-préfet d’Istres, ne dissimule rien de « la menace d’une réelle déconfiture » si l’examen des autorisations venait à traîner. Il suggère « une gouvernance qui rassure les investisseurs et pose les leviers de compétitivité dont les industriels ont besoin ». Les mots d’Opération d’Intérêt National, comme Euroméditerranée à Marseille, ne sont pas prononcés, mais l’esprit serait similaire. Les travaux apaisés du Laboratoire Industrie Fos-Berre, intégrant citoyens et associations aux côtés des industriels, des services de l’Etat et des collectivités, doivent aider à élaborer une vision stratégique à 2040 qui ose afficher ce qui sera accepté ou pas en termes de développement économique.

« La tolérance n’est définitivement plus la même qu’il y a 20 ou 30 ans. Une industrie verte n’est pas forcément mieux acceptée » alerte le sous-préfet. Ce « collectif », Jean-Luc Chauvin, président de la CCI Aix-Marseille-Provence, le réclame pour mettre un maximum de fluidité dans des rouages que des investisseurs peinent à maîtriser. Il met la pression pour des « procédures simplifiées ». « Ces gigafactories se feront, si ce n’est pas ici, ce sera ailleurs, car d’autres sites français nous concurrencent. Sur la ligne 400 KV qui n’est pas qu’un problème industriel mais de toute la région, je ne suis pas rassuré. Le temps perdu ne se rattrape jamais. Plus on laisse de temps, plus les opposants s’organisent. Ce territoire est incapable de jouer collectif ».

 

Pour Damien Rauscher (Métropole), le devenir de la zone de Fos dépend de "sujets fondamentaux" comme les infrastructures ou le foncier (Photo JC Barla)
Pour Damien Rauscher (Métropole), le devenir de la zone de Fos dépend de "sujets fondamentaux" comme les infrastructures ou le foncier (Photo JC Barla)

Danger de tout perdre

Directeur général adjoint du Port de Marseille-Fos, Rémi Costantino, rappelle néanmoins à l’assistance tous les progrès effectués pour discuter et établir des plans et schémas qui dessinent l’avenir. Il présente des cartes, souligne l’attractivité des espaces voués à l’industrie puisqu’ils sont déjà potentiellement pleins pour faire de la ZIP un « hub de décarbonation maritime, logistique et industrielle ». Mais il n’oublie pas les conditions de base : « Sans électricité, sans hydrogène et sans possibilité de captation du CO2, nous n’y arriverons pas. Nous avons besoin de toutes les forces du territoire ». « Nous avons dépassé beaucoup de clivages, admet aussi Damien Rauscher, directeur adjoint de la Métropole. Mais il faut réussir à créer du foncier, des logements, financer et réaliser les grandes infrastructures annoncées, comme la liaison Fos-Salon, le contournement de Martigues-Port-de-Bouc… Ce sont des sujets fondamentaux, sinon tout le reste tombera ».

Agnès Simond (France Travail) avertit qu'il faudra "aller chercher de la main d'oeuvre ailleurs" (Photo JC Barla)
Agnès Simond (France Travail) avertit qu'il faudra "aller chercher de la main d'oeuvre ailleurs" (Photo JC Barla)

Concurrences à venir, idées à exploiter

Les représentants des entreprises porteuses de projets industriels sur la ZIP appellent chaque acteur public ou privé à ses responsabilités de tenir engagements et délais. « C’est très compliqué de sortir en France un dossier classé Seveso (1) seuil haut. Après, il y a tous les aménagements à réaliser sur le GPMM, sur la structuration de la filière photovoltaïque, sur les besoins d’emplois qualifiés… » liste Jérôme Marchais, au nom de Carbon. « Dans notre exercice de concertation publique, la grande préoccupation des gens était moins le risque industriel que le logement et la mobilité » poursuit Alice Vieillefosse pour GravitHy.

Consciente des concurrences à venir sur la quête de compétences parce que le nombre de demandeurs d’emploi en recherche d’un poste dans l’industrie sur le territoire reste inférieur aux attentes énoncées par les investisseurs, Agnès Simond (France Travail) encourage les dirigeants à soigner leur « marque employeur » pour se distinguer et les collectivités à accélérer sur la facilitation des déplacements pour que le temps de transport ne soit pas pénalisant pour les « talents » repérés. « Mais il faudra aller chercher de la main d’œuvre ailleurs » dit-elle. Les perspectives des projets conduisent à l’adaptabilité : Aix-Marseille Université (AMU) enrichit ainsi ses cursus d’ingénieur dans l’écologie industrielle avec l’espoir de débuter en 2025. « On explique aussi aux étudiants les enjeux qu’il y a derrière l’industrie d’aujourd’hui et comment ils peuvent être associés pour porter ces projets » assure Romain Laffont, vice-président d’AMU. « Nous sommes partenaires avec l’Université sur des filières, mais il en manque d’autres. Si elles n’émergent pas, des étrangers viendront occuper ces futurs emplois » renchérit William Joly.

Pour penser demain, la Métropole a fait plancher près de 150 jeunes locaux, nationaux et d’autres pays sur « l’équation complexe à beaucoup d’inconnues » que tous les intervenants ont détaillée. « Il y a des convergences et des lignes de forces. Ces projets méritent une vision d’ensemble. On en a besoin pour donner du sens » conclut Vincent Fouchier, directeur « prospective » de la Métropole.   

(1) La directive Seveso impose aux États membres de l’Union Européenne d’identifier les sites industriels à risque pour y maintenir un haut niveau de prévention. Les sites Seveso produisent ou stockent des substances pouvant être dangereuses pour l’homme et l’environnement. Source : Ministère de la transition écologique




Jean-Christophe Barla




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