Le MIF 68 joue sur du velours avec la Chine

Inauguré le 19 février, en plein lancement de l’année du chien en Chine, le centre de grossistes de mode veut s’imposer comme une étape européenne du projet de nouvelle « route de la soie » promue par la Chine.

Jean-Claude Gaudin, Martine Vassal et Renaud Muselier ont coupé le ruban du « Marseille International Fashion Center » (MIF 68) à Marseille le 19 février, mais ce projet de marché de gros mode et textile ne doit sa naissance qu’à des fonds privés. La société Résiliance de Xavier Giocanti et Gurvan Lemée a investi 17 millions d’euros dans l’aménagement de 3 hectares de terrains au pied du centre commercial Grand Littoral, extensibles à 5 hectares. Sur 16 500 m2, plus de 600 conteneurs transformés en boutiques et bureaux y abriteront 95 boutiques de grossistes principalement chinois mais aussi du Portugal, d’Espagne, d’Italie... « La commercialisation s’élève à 85%, assure Gurvan Lemée. Les locataires prendront progressivement possession de leur espace dans les deux mois ».

Tendances propres

L’origine de ce projet remonte à deux ans et demi, après une rencontre suscitée par Didier Parakian, adjoint à l’économie de la ville de Marseille, entre Résiliance et Dingguo Chen. Ce dernier, président honoraire de l’association des commerçants chinois de Marseille, recherchait un emplacement plus pratique que le quartier Belsunce, en centre-ville, pour y transférer ses activités. « Nous avions besoin d’un meilleur site, plus facile d’accès, avec des possibilités de stationnement, indique-t-il. Ici, c’est un lieu privilégié ». Pour Résiliance qui détient 27 hectares autour de Grand Littoral, MIF 68 devrait accélérer le développement d’espaces qui ont longtemps souffert des mésaventures survenues après l’implantation du centre commercial (glissements de terrain, démolition du cinéma UGC, projets avortés…). « MIF 68 a pour logique stratégique de répondre aux acteurs de la filière mode-textile d’Europe du Sud, poursuit Gurvan Lemée. Sur le pourtour méditerranéen, il n’y a pas les mêmes tendances, les mêmes goûts dans le prêt-à-porter. Les clients pourront venir faire leur choix et trouver des tarifs compétitifs avec les grandes enseignes et le marché de gros d’Aubervilliers. Un fonds va se mettre en place pour promouvoir notre offre à l’étranger et attirer des acheteurs méditerranéens. Mais d’ores et déjà, on nous sollicite plus que nous prospectons ».

Parfum de Chine

Résiliance travaille à un autre projet, baptisé Foresta, porté par l’association « Yes We Camp » sur des terrains voisins. L’originalité de la démarche susciterait de l’intérêt jusqu’aux Etats-Unis, selon le promoteur. Invité à cette inauguration, l’ambassadeur de la République de Chine en France, Jun Zhai, voit dans le MIF 68 la concrétisation d’une « nouvelle ère des relations sino-françaises » et l’instauration d’un « environnement favorable à des coopérations décentralisées entre les deux pays » ainsi qu’à l’implantation d’autres sociétés chinoises en Provence. « Nous pouvons encore développer nos échanges » a martelé de son côté le secrétaire général de la Préfecture des Bouches-du-Rhône, David Coste. Aux yeux de Xavier Giocanti, « Marseille a toutes les qualités pour être une étape européenne de la nouvelle route de la soie, la Belt & Road Initiative, lancée par l’Etat chinois ». Président du Conseil régional, Renaud Muselier entend en faire une priorité sur l’international, « par choix diplomatique et économique ». Martine Vassal, présidente du Département, souhaite pour sa part favoriser l’émergence d’un « Chinatown » en centre-ville pour pallier le départ des grossistes vers le MIF 68. Le « Nouvel an chinois » est propice aux bons souhaits : 2018 devrait enregistrer d’autres actes concrets et ce, dès le printemps, avec la confirmation définitive de l’arrivée de l’industriel Quechen à Fos-sur-Mer.

Jean-Christophe Barla